Visage: un outil à la comédie


Kevin Hart, son visage est un outil narratif, un prodige de précision comique. Cet acteur transforme chacun de ces muscles faciaux en une chose humoristique et émotionnelle, qui captive les spectateurs de par son expressivité qui paraît illimitée. Dans un texte de Roland Barthes, il qualifie le visage de Greta Garbo d' "admirable visage-objet" incarnant un archétype divin et inatteignable. Kevin Hart est loin de ce registre, à l'inverse, son visage agit comme un outil pleinement humain et accessible. Il parvient à exceller dans l'art de communiquer par des expressions faciales. Ils sont exagérées, ses mouvements de sourcils animés et ses réactions avec ses yeux écarquillés contribuent à enrichir ses performances. Il ne se contente pas juste de jouer, il transmet avec une brillance qui fait rire tout en rendant les personnages qu'il interprète profondément humains. Dans une scène du film Central Intelligence (Agents presque secret, 2016) , la CIA fait irruption chez Calvin(Kevin Hart), il découvre que son ancien camarade de lycée est recherché par la CIA pour meurtre et est suspecté d'avoir couvert Bob, Kevin Hart montre une pile d'émotions en quelques secondes: surprise, incompréhension, nervosité et colère. Les gros plans sur son visage saisissent chaque petite réaction: ses yeux s'ouvrent grand, sa bouche se fige avant de former un sourire forcé puis passe à la rage, ce qui accentue l'humour de la situation tout en rendant son personnage crédible.
L'interprétation d'un visage à l'écran est influencée par les fragments visuels qui l'entourent, selon l'effet Koulechov. Dans le cas de Kevin Hart, les gros plans sur son visage sont souvent associés à des éléments extérieurs, ce qui va accentué l'humour comme dans la situation absurde dans Central Intelligence (Agents presque secret, 2016), ou les interactions avec ses co-stars, comme Dwayne Johnson ou encore Ice Cube. L'effet Koulechov fonctionne dans ces scènes. Dans la scène du film, Jumanji: Welcome to the Jungle (2017), lorsque son personnage Moose découvre ses faiblesses dans le jeu vidéo (comme son allergie mortelle aux gâteaux), ses expressions balancent entre l'exaspération et le désespoir. Ses sourcils froncés et son regard désemparé rendent la scène symbolique, où l'humour naît du contraste entre son semblant de sérénité et l'urgence de la situation.

Robert Bresson et les frères Dardenne évoquent dans un texte , l'idée d'un visage modulé et plastique. Cela peut s'appliquer au jeu de Kevin Hart. Son visage paraît toujours en mouvement, il peut passer d'une émotion à une autre avec fluidité. Cela lui permet une grande diversité d'expressions, tout en gardant une cohérence comique. Fatherhood (Un papa hors pair, 2021) , dans ce film dramatique, son visage est utilisé de manière subtile pour exprimer l'amour et la tristesse. Contrairement à ses rôles comiques où l'exagération est maître, ici son visage est à peu marqué par des changements émotionnels, ce qui transmet une sincérité touchante. La notion de vérité émotionnelle de Stanislavski fait écho, le mélange entre retenue et expressivité.
Son visage expressif est devenu en quelque sorte sa marque de fabrique, élément important et essentiel qui définit son identité à l'écran. Ses réactions faciales sont tout de suite reconnaissables et permettent à nous spectateurs de s'identifier à ses personnages, qu'ils soient en plein problème ou en quête de rédemption.